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C’est une femme à la recherche de la liberté qui se lance dans le tourbillon de la vie parisienne. L’Italie est déjà pour elle, une sorte d’eldorado prometteur de beauté et de passion. Au Musée du Louvre, Aurore découvre les peintres vénitiens : Le Titien, Véronèse, Tintoret. ”Je contemplais, j’étais dominée, j’étais transportée dans un monde nouveau. Il me semblait avoir compris je ne sais quel trésor d’infini dont j’avais ignoré l’existence.

Sensible au message des musiciens et des peintres italiens, elle l’est aussi au sort de ce pays malheureux l’Italie, soumis à l’occupation autrichienne en révolte contre l’oppresseur. “L’Italie et la Grèce combattent pour leur liberté nationale, mais l’Église et la monarchie se prononçaient contre ces généreuses tentatives. L’esprit libéral devenait pour moi synonyme de sentiment religieux." Elle déteste l’esprit prêtre, réactionnaire, sentiment dont elle ne se défera jamais et qui l’empêchera de goûter au charme de la ville de Rome quand elle y viendra dans son âge mûr. Comme l’Italie asservie en quête de sa liberté, de son indépendance, la jeune baronne Dudevant ne rêve plus que d’émancipation et de départ.

Le Paris romantique est entiché de l’Italie. Beaucoup de Français écrivent leurs impressions de voyage ou des romans inspirés par leur séjour dans la péninsule : Chateaubriand a immortalisé la Campagne romaine, Mme de Staël a conté les aventures de Corinne en Italie dont la lecture a séduit la jeune Aurore. Stendhal écrit la Vie de Rossini. Les délicieuses Promenades dans Rome ont rencontré du succès. Lamartine évoque Naples dans son recueil des Méditations. Aurore lit aussi Les Fiancés de Manzoni qu’elle adore. Silvio Pellico écrit Mes prisons, ouvrage qui sensibilise les Français au sort malheureux des patriotes italiens pourchassés, mis en prison par le gouvernement autrichien. Le Risorgimonto, ce mouvement nationaliste visant à le chasser, couvre dans le nord de la péninsule.

La rencontre d’Aurore avec Jules Sandeau dénoue ses derniers liens conjugaux. Avec lui, elle écrit Rose et Blanche, l’Histoire du rêveur ayant pour cadre, la Sicile et l’Etna. Dans la Prima donna elle exprime déjà ses opinions sur le bel canto italien qu’elle juge affligé de trop de rossignolades. Elle préfère d’ailleurs le chant du merle à celui du rossignol.

1832, année décisive pour Aurore devenue, pour un temps la compagne de Jules Sandeau, “aimable et léger comme le colibri des savanes parfumées“ écrit l’amoureuse des oiseaux. Idylle de courte durée mais non négligeable puisque la romancière lui emprunte un partie de son nom. Elle écrit Indiana, cette fois entièrement de sa plume, roman qui avec les suivants, Valentine et Lélia, lui assurent une notoriété immédiate, au parfum de scandale. Ce sont des tableaux navrants d’échecs conjugaux, d’unions mal assorties, presque des confidences. Elle dénonce la servitude de la femme mariée qui doit subir la loi d’un homme qu’elle n’a pas choisi. Ces romans sont le fruit de sa propre expérience conjugale avec Casimir Dudevant et aussi de sa déception amoureuse avec Jules Sandeau.

Le salon de la cantatrice Giuditta Pasta accueille les exilés, les Carbonari italiens et leurs sympathisants. George correspondra bientôt avec Giuseppe Mazzini, le théoricien du Risorgimento, admirateur de ses romans. Le violon de Paganini séduit les Parisiens. Aurore aime la musique depuis son enfance. Elle considère l’art musical comme un excitant supérieur qui la met dans un état second propre à la création.
Dans ces salons parisiens tout bruissants de mélodies, la jeune baronne Dudevant rencontre aussi les peintres, pour qui l’Italie est le berceau des arts. Eugène Delacroix qui deviendra un excellent ami de George Sand peint la Barque de Dante (1822), inspiré par la Divine Comédie. Jeune pensionnaire, elle s’est enthousiasmée pour cette grande œuvre. Voici ce qu’elle écrivait à son amie Émilie : “Tu n’as sûrement pas lu Le Dante ! Il y a de quoi devenir fou de son poème de L’Enfer. J’en ai rêvé toute la nuit. Il faut que je te dise les paroles écrites, selon lui, sur la porte de l’enfer :

Per me si va nella citta dolente
Per me si va nell’eterno dolore
Per me si va tra la perduta gente.
Lasciate ogni speranza, voi ch’entrate

Quelle belle et triste cadence dans la monotonie de ces vers ! Ajoute l’amoureuse de la langue italienne.

Pendant toutes ces années, Aurore se partage entre Nohant et Paris. La jeune femme met au monde sa fille Solange en 1828. Elle dessine et découvre dans l’écriture sa respiration naturelle. Elle s’essaie à la composition d’un drame historique inspiré par la Florence des Medicis : Une conspiration de 1537 qui deviendra sous la plume de Musset, le chef-d'œuvre théâtral, Lorenzaccio. Elle lit Les Mémoires de Casanova. Le héros de son roman Lélia, Trenmor : “Cet homme de mœurs élégantes et de sensations poétiques, celui qui volait sur les flots de la belle Venise entouré de femmes, de parfums et de chants, dans sa gondole rapide" ce héros séducteur qu’elle décrit, est typiquement casanovien, presqu’un cliché.

La jeune romancière fait beaucoup parler d’elle. “À Paris, Mme Dudevant est morte mais George Sand est connue comme un vigoureux gaillard“, note-t-elle, avec satisfaction. Ses tenues vestimentaires, son absence totale de préjugés, ses liaisons amoureuses défraient la chronique parisienne. Elle est belle, sulfureuse et pleine de talent. Une figure incontournable de ce Paris romantique qui vibre aux drames échevelés de Victor Hugo, d’Alexandre Dumas, d’Alfred de Vigny.

George Sand et l’Italie : 2. Paris-1830