La Venise de Vittore Carpaccio


"Un miracle de la relique de la vraie croix", peint en 1494.

C'est un document caractéristique de la vie vénitienne à l'époque de Carpaccio, il représente le Grand Canal au Rialto.

Avant d'entrer dans la légende de Sainte Ursule, entrons dans la ville de Venise sous l'égide du Lion de Saint Marc (peint en 1516) Il nous ouvre les portes de la cité magique, comme il nous ouvre l'évangile de Saint Marc qu'il nous présente d'une patte griffue pour attirer notre attention. "Pax tibi Marce Evangelista meus" : "Paix à toi Marc, mon évangéliste", lit-on clairement. Le lion ailé, emblème traditionnel de l'évangéliste Marc, était aussi le symbole de la République de Venise qui avait choisi le saint pour patron, dès le IXème siècle.

Selon une pieuse légende, le corps de l'Évangéliste avait été dérobé par des marins vénitiens à la ville musulmane d'Alexandrie et transporté à Venise en 829.Les mots écrits sur les pages du livre grand ouvert disent l'agrément divin à son lieu de repos définitif (repose-toi ici, sur cette terre qui est tienne désormais). Dans cette merveilleuse toile, que l'on peut admirer au Palazzo ducale, on retrouve l'iconographie traditionnelle suivie par Carpaccio. Le lion ailé, un des symboles familiers de Venise, occupe majestueusement l'espace. Son corps puissant, à moitié dans l'eau, à moitié sur la terre ferme, symbolise la domination de Venise sur ces deux éléments. À l'arrière plan à gauche, on reconnaît une vue fidèle de la Piazza - telle qu'on peut la voir de l'île Saint Giorgio Maggiore. On voit clairement la basilique San Marco, le palais des Doges et le campanile avec sa flèche pyramidale restaurée. À droite, les navires sortent de l'Arsenal : ils ont fière allure et parlent de conquêtes. Au premier plan, le beau lion ailé nous parle ; sa présence s'impose. Ses ailes effilées, striées de pourpre et d'argent le hissent vers les cieux pommelés et protègent les navires marchands ; son mufle apaisé d'animal habité par l'Esprit s'orne d'une auréole rougeoyante : d'elle, il reçoit le don de parole et nous transmet le récit de Marc auquel il sera toujours associé. Son élégance et sa force maîtrisée sont celles de la République de Venise. L'aspect sauvage et désordonné du plan de gauche est comme éclairé et apaisé par la blancheur du Livre Saint ; la végétation dessine des lettre obscures que l'évangile dévoile. Les cinq blasons au bas de la toile rappellent les 5 magistrats qui commandèrent le tableau.

Nous voilà introduits dans la ville et prêts à goûter ses mystères, son charme prenant et les milliers d'histoires qu'elle nous raconte.


©mhviviani