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Malheureux, coupable, subjugué, Alfred prend place dans ce tableau mystique à trois personnages où il est prié de figurer en ange de lacceptation. Sous des dehors de dandy cynique, malgré un penchant pour une vie dévoyée, cest un jeune homme, sensible et déchiré qui sest brûlé aux feux de Lelia. Il souffre, il est jaloux mais il est prêt à entrer dans le jeu qui lui est imposé. Il na pas la certitude que George le trompe ; elle est si convaincante, si noble !. Il se persuade quil nest pas digne de sa maîtresse et quelle a trouvé en Pagello lhomme idéal qui saura la comprendre et laimer. Le 27 mars, deux jours avant de quitter Venise, il lui écrit : Jai senti que javais mérité de te perdre et que rien nest trop dur pour moi. Sil timporte peu de savoir si ton souvenir me reste ou non, il mimporte à moi, de te dire que rien dimpur ne restera dans le sillon de ma vie où tu as passé et que celui qui na pas su thonorer quand il te possédait, peut encore y voir clair à travers ses larmes et thonorer dans son cur, où ton image ne meurt jamais. Étranges paroles semblables à celles quun croyant adresse à la sainte icône de la Mère quil a offensée. Cette déclaration passionnée nous en dit long sur la puissance de séduction quexerçait George Sand ! Même deux ans plus tard, en 1836, quand Musset donnera une version romancée de sa liaison avec George, dans Les Confessions dun enfant du siècle, il parlera delle avec élégance et ferveur, au grand contentement de madame Sand. Il présente sa maîtresse sous les traits de Brigitte Pierson, et fait un portrait flatteur de cette femme dont les yeux noirs le hanteront jusquà la mort. (2 mai 1857). Pourtant, la même année en 1834, dans son poème, La Nuit doctobre, il laisse paraître rancune et colère envers celle qui la trahi. Il aura appris entre temps que George Sand et Pagello filaient le parfait amour alors même quil gisait malade, à Venise
Le poète se souvient de Venise, de sa maîtresse infidèle pressée de le voir partir, de lhorreur de cette situation chaotique où il ne fut quun pauvre pantin manipulé. Il est vrai quen ce printemps vénitien de 1834, George veut étouffer en elle, tout sentiment de culpabilité, revivre, senivrer dun nouvel amour. George Sand veut mordre la vie comme on mord dans un fruit. Ce fruit est là, à sa portée. Il la tente, il sappelle Pietro Pagello. Rien ne lempêchera dy goûter. Dans son Journal intime, quelques années plus tard, sans faux-fuyant, sans ce recours à leuphémisme dont elle abuse, parfois si agaçant, elle écrira ceci : "Mon Dieu ! Rendez- moi ma féroce vigueur de Venise. Rendez-moi cet âpre amour de la vie qui ma prise comme un accès de rage, au milieu du plus affreux désespoir. Lamour de la vie est donc un crime ? Lhomme qui vient dire à une femme : vous êtes abandonnée, méprisée, chassée, foulée aux pieds; vous lavez peut-être mérité. Eh, bien moi, je ne vous connais pas mais je vois votre douleur et je vous plains et je vous aime. Je vous aiderai à remplir vos devoirs près dun adolescent Un homme qui disait cela, pouvait-il me sembler coupable à ce moment-là ? Combien cette femme-là, celle du Journal intime, nous paraît séduisante dans sa sincérité, quand elle oublie de se draper dans le rôle de la femme parfaite, de lamoureuse au-dessus de tout soupçon. |
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